Pamela Dellal, mezzo soprano

 

uncommon intelligence, imagination and textual awareness...
PDme

 

 

Sonnets à Cassandre: Pierre de Ronsard (1524-1585) – Frank Martin

Qui voudra voir comme un Dieu me surmonte,
Comme il m'assaut, comme il se fait vainqueur,
Comme il renflamme et renglace mon coeur,
Comme il se fait un honneur de ma honte,
Qui voudra voir une jeunesse prompte
A suivre en vain l'objet de son malheur
Me vienne lire: il verra ma douleur
Dont ma déesse et mon dieu ne font compte.
Il connaîtra qu'Amour est sans raison,
Un doux abus, une belle prison,
Un vain espoir qui de vent nous vient naître.
Et connaîtra que l'homme se déçoit
Quand plein d'erreur un aveugle il reçoit
Pour sa conduite, un enfant pour son maître.

Whoever would see how a God overcomes me,
How he assaults me, how he seizes victory,
How he enflames and freezes my heart,
How he makes a trophy of my shame,
Whoever would see youth ready
to follow in vain after the object of its own ill,
come and read me: he will see my sorrow,
of which my goddess and my god take no account.
He will recognize that Love is without reason,
a sweet abyss, a lovely prison,
a vain hope which is born of the wind.
And will know how a man deceives himself
when, full of error, he take a blind man
for a guide, a child for his master.

Nature ornant la dame qui devait
De sa douceur forcer les plus rebelles
Lui fit présent des beautés les plus belles
Que dès mille ans en épargne elle avait.
Tout ce qu'Amour avarement couvait
De beau, de chaste et d'honneur sous ses ailes
Emmiella les grâces immortelles
De son bel oeil qui les dieux émouvait.
Du ciel à peine elle était descendue
Quand je la vis, quand mon âme éperdue
En devint folle, et d'un si poignant traìt
le fier Destin l'engrava dans mon âme
Que, vif ne mort, jamais d'une autre dame
Empreint au coeur je n'aurai le portrait.

Nature, adorning the lady who must,
by her gentleness, compel the most rebellious,
bestowed on her the loveliest of beauties
which it had kept in reserve for a thousand years.
All that Love jealously retained
of beauty, of chastity and nobility under his wings
honeyed the immortal graces
of her lovely eye which stirred the gods.
She had just then descended from heaven
When I saw her, when my stricken soul
became mad for her, and with such a wounding blow
cruel Fate engraved her in my soul
that, alive or dead, no other lady's
portrait will ever be imprinted on my heart.

Avant le temps tes tempes fleuriront,
De peu de jours ta fin sera bornée,
Avant ton soir se clorra ta journée,
Trahis d'espoir tes pensers périront.
Sans me fléchir tes écrits flétriront,
Dans ton désastre ira ma destinée,
Ta mort sera pour m'amour terminée,
De tes soupirs nos neveux seriront.
Tu sera fait d'un vulgaire la fable,
Tu bâtiras sur l'incertain du Sable
Et vainement tu peindras dans les cieux.
Ainsi disait la nymphe qui m'afolle,
Lorsque le ciel, témoin de sa parolle,
d'un dextre éclair fut présage à mes yeux.

Before their time your temples will be gray,
to mere days your end is brought,
Before your eve your day will close,
betrayed by hope, your thoughts will perish.
Without touching me, your writings wither,
in your disaster lies my destiny,
your death will be the end of my love,
at your sighs our descendants will laugh.
You will become a tale of common-folk,
you will build upon the instability of sand,
and vainly you will paint the skies.
Thus spoke the nymph who drives me insane,
while the heavens, witness to her words,
with a rapid flash bore omen to my eyes.

Quand je te vois, seule, assise, à part toi,
Toute amusée avecque ta pensée,
La tête, un peu, encontre bas baissée,
Te retirant du vulgaire et de moi,
Je veux souvent, pour rompre ton émoi,
Te saluer, main ma voix offensée
De trop de peur se retient amassée
Dedans ma bouche, et me laisse tout coi.
Souffrir ne puis les rayons de ta vue,
Craintive au corps mon âme tremble émue,
Langue ni voix ne font leur action.
Seuls mes soupirs, seul mon triste visage
Parlent pour moi, et telle passion
De mon amour, donne assez témoignage.

When I see you, alone, seated, by yourself,
completely amused with your thoughts,
your head tilted and bent low,
withdrawing yourself from the crowd and from me,
I often wish, to break your mood,
to greet you, but my voice, assailed
by too much fear, is dammed up
within my mouth, and leaves me mute.
I cannot endure the radiance of your glance,
fearful, my soul trembles timidly in my body,
neither tongue or voice performs its office.
Only my sighs, only my sorrowful face
speak for me, and such passion
may give sufficient witness to my love.

© Pamela Dellal